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Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/99

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paresseuses qu’il lui faudrait cinq minutes de réflexion avant de parer le coup qui menace sa vie ? Et pourtant la science humaine, sous toutes ses faces, n’a encore jamais procédé autrement. C’est par siècles qu’il faut compter les temps d’arrêt de son activité ; c’est par générations qu’il faut constater les maladies de torpeur où elle est tombée.

Il semble que les sociétés soient fatalement condamnées à se dissoudre par la mort avant de se réveiller à la vie.

Cette impitoyable loi du passé sera-t-elle la loi de l’avenir ? Les hommes vont-ils rester incomplets au point de s’enfermer, selon la nature de leurs instincts follement caressés, dans une sphère d’action morale ou physique exclusive de tout autre soin ? Seront-ils orgueilleux ou fainéants au point de se dire sans cesse : « Ce que je n’aime point à apprendre, ce que je n’ai pas le courage de tenter, est inutile ou nuisible ? » En d’autres termes, y aura-t-il toujours des révélateurs impuissants qui nous diront d’attendre, et des réalisateurs brouillons qui nous crieront d’avancer au hasard, sans qu’au milieu de ces indications contraires, nous soyons hommes nous-mêmes, et sans que nous sachions penser et agir simultanément ?

Non ! Ce divorce entre l’action et la pensée appartient à l’enfance, et il est bien temps que nous entrions dans l’âge de la virilité. Il est bien temps qu’un homme qui n’agit pas, et un homme qui ne réfléchit pas, soient considérés comme deux malades, l’un de paralysie, l’autre de fièvre délirante. Il est bien temps que nous