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Page:Sand - Tamaris.djvu/170

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énergique dans le cadre d’une région âpre et morne. Le travail de l’homme était là en pleine émission de puissance. Les animaux, soignés et nourris comme méritent de l’être des bêtes d’un grand prix, étaient magnifiques, caractérisés comme les études de Géricault, mais d’un type plus noble. À un endroit aplani où l’un de ces convois faisait halte, j’interrogeai les conducteurs. J’appris que les vingt-cinq chars, attelés de cinq chevaux chacun, ne pouvaient être évalués à moins d’un total qui dépassait deux cent mille francs, sans parler du chargement.

Comme la journée s’avançait et que je ne voulais pas perdre mon temps à errer, je cherchai un guide à Turris, qui est situé sur la croupe de la montagne, à l’entrée de la forêt. Un vieux charbonnier qui s’y rendait m’offrit de me conduire : j’acceptai ; mais, au bout d’un quart d’heure de marche, je vis qu’il allait au hasard ; il m’avoua qu’il n’était pas du pays même et n’était pas monté là depuis vingt ans.

— Alors, lui dis-je, allez où bon vous semblera ; j’en sais aussi long que vous.

Il haussa les épaules sans rien dire et disparut dans le fourré. Évidemment, il m’avait déjà égaré, car on m’avait parlé d’un sentier commode à suivre, et il n’y en avait plus trace autour de moi. La forêt n’était plus qu’un taillis de petits arbres bossus et malheureux ; mais ils masquaient partout la vue, et,