Page:Sand - Theatre complet 1.djvu/360

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d’affaire. Le roi envoie un troisième page, qui dit comme ça : « Palsembleu ! monsieur Lulli, le roi vous attend. » Sur quoi, M. Lulli lui répliqua : « Le roi est le maître, n’est-ce pas, monsieur ? — Oui, monsieur. — En ce cas, monsieur, il est le maître d’attendre. »

MOLIÈRE.

Ce diable d’homme, qu’il a d’esprit ! Sais-tu si le roi s’est fâché ?

PIERRETTE.

On dit qu’il a ri de bon cœur. Vous voyez bien que vous n’avez point tant de tourments à vous donner. Ces messieurs ni ces dames n’iront point si vite que vous. Mademoiselle Madeleine Béjart, je ne dis pas, elle est comme vous, celle-là, toujours pressée ; mais l’autre ! oh ! qu’elle est donc musarde !

MOLIÈRE.

Armande ?

PIERRETTE.

Il lui faut plus d’une heure pour ajuster un nœud, et, quand elle a fini, elle se regarde dans son miroir bien tranquillement, du temps que tout le monde crie après elle.

MOLIÈRE.

Tu es injuste ! depuis quelque temps, elle est devenue fort diligente.

PIERRETTE.

Oui, quand vous la regardez, parce qu’elle veut vous complaire.

MOLIÈRE, tressaillant.

Elle veut me plaire ? Que dis-tu là ?

PIERRETTE.

Elle est fine ! elle voit que vous devenez tous les jours plus riche, plus caressé des grands messieurs, plus aimé du roi, plus fameux dans la cour et dans la ville, et elle connaît bien qu’il y va de son intérêt de vous contenter pour demeurer dans voire troupe et y représenter les premiers rôles. Ce n’était point comme ça du temps que vous n’étiez qu’un