Aller au contenu

Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

bien qu’elles vivent non loin l’une de l’autre, en Bretagne. Des nuances d’opinion…

HENRI.

Je sais cela, monsieur ; mon père n’a pas beaucoup marché avec son siècle ; mais, moi, je n’épouse pas toutes ses croyances. Plusieurs de mes amis qui vous connaissent vous tiennent pour un galant homme, et, si vous avez la même opinion de moi, qui suis à peu près inconnu en Bretagne…

LA HYONNAIS.

J’ai très-bonne opinion d’un homme qui a été formé par M. le docteur Laurent.

HENRI, gaiement.

Oh ! il m’a bien mal élevé ! Vous croyez qu’il s’entend à former la jeunesse, lui ? Pas du tout ! Il l’aime, il la choie, il veut l’instruire en l’amusant, il excuse toutes ses langueurs, il pardonne à toutes ses sottises !… Voilà pourquoi je suis un ignorant, un écervelé, un véritable enfant gâté… ici ! Ailleurs, je me conduis mieux. Je me borne à être un désœuvré et un insignifiant de plus dans le monde.

Il passe devant le docteur, qui arrange des papiers sur le guéridon.
LE DOCTEUR.

Ah ! ça, c’est possible ! et je m’en lave les mains ; mais, s’il n’a pas conservé un bon cœur, il est bien hypocrite, car l’amitié qu’il nous a gardée paraît vraie (avec intention) et loyale…

HENRI, vivement ; il est assis près du guéridon.

Oh ! pour cela, oui ! elle est vraie ! Comment donc ! il n’y a que cela de sérieux dans ma vie.

LE DOCTEUR, bas, à la Hyonnais.

Vous voyez cette expansion charmante ?

LA HYONNAIS, de même.

Oui, certes, il est aimable et paraît aimant.

LE DOCTEUR, haut.

Quant à son instruction, je n’ai jamais pu en faire un érudit ; mais…