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Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/110

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PLUTUS.

Je n’irai pas plus loin, Mercure ; je suis trop fatigué quand il me faut aller chez ceux qui travaillent. Ton père me fait une vexation et une injustice. Je n’aime à enrichir que les riches. Cela donne moins de peine. (Il s’assied.)

MERCURE.

Couche-toi donc comme un chien, stupide paresseux ! Vraiment, si les hommes te connaissaient, ils ne t’auraient pas même rangé parmi les dieux subalternes.

PLUTUS.

Qu’est-ce que tu dis, Mercure ? Je suis un dieu ?

MERCURE.

Te voilà sourd à présent ? Il ne te manquait que cela !

PLUTUS.

Je ne suis pas sourd. Si les hommes me prennent pour un dieu, j’en suis un, et j’entends que tu me traites comme ton égal.

MERCURE.

Mon égal ! toi, mon esclave ? Prends garde que je ne t’applique mon caducée sur les oreilles !

PLUTUS.

Oui-da ! je ne te crains guère, l’homme au petit chapeau ! L’esclave, c’est toi, mon bon ami ; car tu ne peux te passer de moi ; sans moi, tu n’es rien ; c’est ce qui fait que tu n’es pas plus dieu que moi-même.

MERCURE.

Tais-toi, brute ! Je suis le fils de Jupiter !

PLUTUS.

La preuve ?

MERCURE.

Les ailes de mon cerveau. Je suis l’intelligence, l’invention, le calcul, l’activité… Si les hommes abusent de mes conseils, ce n’est pas ma faute.

PLUTUS.

En attendant, tu te conduis comme un fripon, et je me déclare innocent de tout le mal auquel tu m’emploies. Tu reçois