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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/116

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MAROUSSIA

Des chevaux galopaient sans cavaliers. Les cadavres s’amoncelaient par endroits. Les corps des blessés attendant le dernier coup jonchaient le sol. Les colonnes, tout à l’heure profondes, s’éclaircissaient ; le nombre des vivants diminuait presque à vue d’œil. La terre était, sur de grands espaces, rouge de sang. Le ciel était obscurci.

Hélas ! il ne nous appartient pas d’expliquer de telles fureurs !

Au delà, pas bien loin de ces scènes abominables, et tout droit devant elle, pareille à une oasis se montrant à travers les orages, fleurissait et embaumait la métairie de Knich. Du haut de son observatoire, Maroussia reconnaissait déjà le feuillage de chaque arbre au milieu du jardin touffu ; la couleur de chaque fleur se détachait sur les fonds verts.

La porte cochère était ouverte, et ses jeunes yeux distinguèrent une bande nombreuse de poulets d’un jaune doré qui, sans souci du combat, prenaient leurs ébats dans la grande cour ; à plus forte raison apercevait-elle dans cette cour les chariots, les charrues au soc brillant, les instruments de travail, les fourches, les bêches, les râteaux, les pelles attendant les ouvriers, les laboureurs qui d’ordinaire les utilisaient.

Près de la porte se tenait un énorme chien, noir comme du jais, ébouriffé comme un toit de chaume après grande pluie et tempête.