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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/206

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MAROUSSIA

océan, on pourrait disparaître comme une goutte d’eau.

Un instant un sourire passa sur ses lèvres ; elle revoyait en rêve la maison de ses parents, le clos des cerisiers si embaumé, ses petits frères, tous les visages amis ; mais bientôt tout disparaissait comme dans un brouillard. Sa vie passée, si calme et si riante, reculait à l’arrière-plan. Sur le premier, se dressaient en traits de feu des images nouvelles, terribles ou grotesques, des figures qu’elle ne connaissait que depuis peu, mais auxquelles appartenait tout son avenir.

Tout à coup elle se réveilla, se souleva un peu sur son lit improvisé et regarda de tous ses yeux.

Ils ne dormaient pas, eux !

Tchetchevik était toujours assis, accoudé près de la table, et ses regards étaient de vrais astres qui brillaient d’une lumière calme, égale, resplendissante.

Le grand ataman était debout au milieu de la chambre. On voyait qu’il s’était élancé de sa place dans un mouvement de douloureuse indignation, mais qu’une fois cet effort fait, la violence d’un coup porté trop juste l’avait comme pétrifié.

Enfin il parla :

« Voilà ce que vous voulez, vous autres ! Mais le remède sera pire que le mal. Je sais bien que je me suis jeté à l’eau sans m’être inquiété de l’endroit où