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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/225

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LES RENCONTRES.

« Elles ne vous connaîtront jamais. Rien qu’à vous voir de loin, elles se flétrissent.

« Craignez les pleurs de l’innocent. Ils retomberont un jour sur celui qui les fait verser.

« Craignez le silence de l’homme injustement frappé : le knout n’a jamais tué une âme, et l’âme du père injustement frappé s’ajoute à l’âme de l’enfant. Les colères s’y amassent. »

La chanson était courte, mais expressive. Après l’avoir finie, le grand ami, pendant quelques instants, toucha doucement les cordes du théorbe. Ses yeux perçants étaient fixés sur le Dniéper. Maroussia, elle aussi, ne détachait pas ses yeux du fleuve.

Tout à coup, une mouette fit entendre son cri. Cette mouette semblait être sur le bord du fleuve, au pied des grandes roches, là, dans les joncs de la rive.

Les yeux du grand ami brillèrent d’un éclat plus vif, et l’écho des montagnes répéta le refrain d’une nouvelle chansonnette :

« Dans le monde entier, on ne trouve point un malheureux aussi misérable qu’un Ukrainien chassé du pays où Dieu l’a fait naître ; son devoir, s’il ne peut y vivre, est de mourir au pays de ses pères. Quoi que vous fassiez, il y mourra et vous y mourrez avec lui ! »

Le cri de la mouette se fit entendre de nouveau,