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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/261

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NE JOUEZ PAS AVEC LES POIGNARDS.

Maroussia avait repris sa place auprès de son grand ami, sans que personne se fût aperçu qu’elle l’avait quittée un instant.

Le rapsode chantait toujours :

« Le Paradis est pour les justes… pour eux seuls.

— Pour eux seuls… murmura le grand ataman.

— Les oppresseurs, les vainqueurs y verront entrer leurs esclaves, mais l’ange au glaive de feu leur en interdira l’entrée. »

Le seigneur russe en avait assez de cette musique. Il fit semblant de cacher un bâillement.

« Voilà, dit le grand ataman, des choses qu’il ne faudrait jamais oublier.

— Connais-tu la chanson du bandit ? cria le seigneur russe au musicien. Chante-la-nous, vieux bonhomme.

— À mon grand regret, Excellence, je ne la connais pas, répondit le bonhomme.

— Tant pis ! dit l’aimable seigneur : elle aurait amusé ces dames. Les dames ont du goût pour les coquins illustres. »

Méphodiévna, de si loin qu’elle fût, jeta un regard si fier sur l’envoyé courtisan, que celui-ci baissa les yeux, et qu’une rougeur fugitive colora un instant son visage.

« Ton théorbe est bien curieux, dit le seigneur russe au rapsode pour changer la conversation. Ce n’est pas un instrument ordinaire. T’en doutes-tu ?