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LE PETIT MOUCHOIR TROUÉ.

choir rouge qu’elle a sur la tête ? Un chiffon, sa balle l’a troué. Il ne vaut pas qu’on le ramasse.

Le cavalier rend la main à son cheval, poursuit sa route et disparaît, comme un homme trompé dans son attente. Maroussia n’a été pour lui qu’une ombre entrevue sur sa route.

Tout est redevenu tranquille. Cela a été si vite fait ! C’est à croire que rien n’est arrivé au bout de ce pont.

Cependant, un paysan portant un lourd fagot sur ses épaules, sort à pas lents du petit bois que Maroussia devait trouver à gauche du pont. Puis il a dépassé le moulin que la blanche lumière de la lune argentée. Il n’est pas pressé, il ne regarde ni à gauche ni à droite. Il ne se doute pas que, tout à l’heure, le chemin qu’il va prendre n’était pas sûr.

Il s’engage sur le pont. Il voit les deux couronnes, il les ramasse et les accroche à son fagot. Sans doute, il a des petites filles. Il leur rapportera les couronnes. Il a passé le pont. Sa charge le gêne. Il s’en débarrasse un instant et, pour se délasser, s’accoude sur le tronc d’arbre qui sert de parapet au pont rustique. De là, machinalement, il regarde. Qu’est-ce qu’il aperçoit dans les joncs ? on dirait un bouquet de fleurs rouges. Il faut voir cela de près. C’est une enfant. Un de ses pieds baigne dans l’eau. Lui, il est à genoux. Il soulève le corps inanimé et le retire un peu sur la berge. La lune est dans son plein. Il regarde avec pitié la jolie