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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/82

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MAROUSSIA

— Comme elle avait bien fait de mettre sa robe noire ! dit Maroussia. Grâce à cette couleur de nuit, son mari ne l’apercevait pas. Il lançait dans l’épais feuillage le fer de sa lance, à tâtons, au hasard, et, de préférence, dans les parties les plus sombres. Terrifiée, muette, immobile, entourant de ses bras crispés la branche qui lui servait d’appui, elle recommandait son âme à Dieu en lui demandant de faire son corps invisible.

« Trois fois un fer froid lui entra dans les chairs ; son sang tombait comme une rosée. Eh bien ! elle ne bougea pas, elle eut ce courage, elle ne fit ni un cri ni même un : ah !

— C’est navrant, ton histoire, Maroussia. Ah ! l’infortunée ! »

Maroussia, tout à son récit, continua :

« Le lieutenant de son mari, voyant que tout était inutile, dit à son capitaine d’un ton bourru :

« — Le temps perdu par nous dans cette clairière est tout profit pour celle que nous cherchons. Le village est tout près, la ville n’est pas loin. Si nous restons ici un quart d’heure de plus, votre femme y arrivera avant nous, mon capitaine. C’est peut-être fait. »

« À la pensée que sa femme, évidemment maîtresse de son secret, pouvait lui échapper et que sa vie serait connue… une imprécation sortit de la bouche du capitaine :