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Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/259

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sous un figuier. Il en est de même de toutes les habitations de ce pays ; elles sont nichées derrière des orangers ou des palmiers, on en voit qui sont recouvertes de hautes treilles qui les enveloppent merveilleusement.

Nous partons à pied par un chemin qui monte vers l’Ouest. Nous franchissons un pont en planches sous lequel on entend murmurer l’eau sans la voir. C’est un ruisseau entièrement recouvert par des plantes grasses, sorte de nénuphars qui trouvent là un sol propice à leur développement, car ils sont pleins de vie et d’un vert tendre. On est tenté d’en cueillir. Sur la gauche, nous prenons un sentier qui nous conduit au bord de la mer, à l’anse qui porte le nom de cette vallée.

Là, mon maître s’arrête pendant un moment, il contemple la pleine mer avec ravissement.

« Que c’est beau, s’écrie-t-il ; cet horizon est incomparable ! Je trouve plus de charme, plus de beauté poétique à la mer, ici, que je n’en ai jamais vu nulle part. Voyez comme ces mouvements d’ondulation sont gracieux. Et cette vague toute mince, avec quelle légèreté elle vient mourir sur cette bande de sable blanc ! Ce n’est plus ce battement, cette lutte qui se produisent ailleurs entre les deux éléments, mais une caresse qui passe avec une douceur telle qu’on peut penser qu’ils ont grand plaisir à se rencontrer… »

À droite, se trouve le mouillage de la terrasse ; le cap Camarat lui fait abri ; nous l’avons doublé quelquefois.

Mon maître se taisait, sa figure rayonnait et laissait voir l’émotion qu’il éprouvait devant cette splendeur de la nature. Il se mit à marcher, scandant ses pas sur le sable fin de la plage. Il se dirigeait maintenant vers le centre de la vallée, avançait vite, serrant dans sa main