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ÂME BLANCHE

Cette impression d’enfance m’est restée au cœur, avec la nostalgie de l’eau, de l’élément limpide et mystérieux qui vous mènera non pas exactement où vous voulez aller…, mais où vous ne savez pas bien, en y rêvant pourtant !

Et voilà que j’étais, enfin, sur une de ces embarcations tant contemplées naguère, par mes yeux ravis, tant convoitées, si ardemment observées dans leurs dispositions spéciales et le détail de leur arrangement extérieur. Et j’y avais pénétré, j’y marchais, j’en touchais du doigt les aîtres, j’en voyais de près les propriétaires… Et tout cela, aîtres et gens, dépassait mon rêve en singularité, en originalité, en charme imprévu et bizarre :

Quelle petite fille n’aurait été séduite par l’ordonnance intérieure de la Reyn bloem, par son mobilier reluisant, aux dimensions réduites, par sa batterie de cuisine lilliputienne, par ses hublots étroits, ornés de rideaux enrubannés, semblables à ceux garnissant les fenêtres des salons de poupées, mis en montre à la vitrine des bazars ! C’était comme si je fusse entrée dans un joujou, dans une de ces merveilleuses maisons des contes bleus, où rien ne manque de ce qui est essentiel à la vie pratique, où se trouvent tous les objets nécessaires à l’existence d’un ménage, mais strictement proportionné à la taille de l’enfance par la main de fées prévoyantes. Je me sentis là immédiatement à l’aise,