Aller au contenu

Page:Yver - Princesses de Science.djvu/244

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
234
princesses de science

— Oh ! voici cinq ou six jours qu’il ne tétait plus beaucoup.

— Malheureuse ! s’écria Thérèse, vous ne m’aviez pas prévenue !

— Déranger Madame pour si peu, je n’ai pas osé… surtout que Madame n’a pas grand temps à elle !

Il était raidi, allongé sur les genoux de sa mère qui soutenait la petite tête dans le creux de sa main. Il avait les paupières béantes ; ses yeux roulaient doucement comme des globes de nacre ; il se plaignait toujours. Thérèse, toute contractée, défigurée par la douleur, le regardait. Guéméné debout, haletait ; des larmes coulaient le long de ses joues, se perdaient dans sa barbe. À cinq heures du matin, il murmura :

— Je ne sais plus rien ; je ne suis plus capable d’avoir une idée.

Sa femme conseilla :

— Téléphone à madame Lancelevée : elle fait de la médecine d’enfants.

Une heure après, la doctoresse arrivait sans bruit, sans paroles, discrète comme une ombre. Elle se dévêtit d’une pelisse de fourrure qui l’enveloppait, prit le bébé qu’elle mit tout nu et dont elle examina la peau sous la lampe.

Thérèse avait les yeux rivés à son masque impassible ; elle espérait lire dans ces traits calmes un diagnostic rassurant. Peut-être une clairvoyance dont la mère n’était plus capable avait-elle démêlé un simple malaise dans la crise de l’enfant.