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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/256

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princesses de science

Fernand qui, d’ordinaire, par une passivité naturelle, une force secrète de caractère, supportait stoïquement ces petits contretemps domestiques, en souffrit ce soir étrangement. Il les additionnait, cherchait en sa mémoire, supputant ces ennuis minimes qu’il avait subis depuis deux ans. La femme de chambre eut un air d’ironie malicieuse pour dire que le dessert était sous clef. Cruellement il sentait son triste ménage jugé par les domestiques. Sa mélancolie s’en accrut. Il monta s’enfermer dans son cabinet. Le ridicule le poursuivait jusque dans sa propre maison.

Il se remit à méditer sur sa découverte manquée. Il s’assit à sa table de travail, tout seul, comme ces tristes célibataires qui rêvent d’une femme près de qui épancher leur cœur. Malheureux et solitaire, il ne l’était pas moins qu’eux ; mais il y avait dans sa peine, à lui, le surcroît d’un abandon. Là où il avait espéré faire, dans les bras de sa femme, la confidence bienfaisante, l’aveu de son découragement, l’appel à la tendre énergie de cette amie si forte, il s’anéantit silencieusement, la tête entre ses mains, et pleura seul.

Alors il regretta d’avoir épousé cette fière et dure camarade qui lui refusait le dévouement. Il se rappela leur enfant qui vivrait encore peut-être si elle l’eût allaité, et sa faim inassouvie de paternité ranima toutes ses rancunes. Il souhaita mourir. À minuit, Thérèse n’était pas encore revenue, et il désirait son retour tout en la maudissant. Une