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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/280

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princesses de science

portait des pantoufles, et, tout en recevant son amie, surveillait d’un regard furtif l’étroite buanderie du jardin, où la bonne d’enfant, près d’une lessiveuse automatique, savonnait le linge de la petite Sonia. Elle introduisit la doctoresse dans la salle à manger, disant que le salon n’était pas « fait ». Une savoureuse odeur de bouillon gras y venait de la cuisine : des paperasses, des registres, encombraient la table : Dina expliqua qu’elle tenait la comptabilité de Pautel. La pièce était spacieuse, tendue de jolies tapisseries modernes, confortablement meublée. Les bois fleuraient l’encaustique. Deux pipes du docteur salissaient la cheminée. Des journaux en désordre s’accumulaient sur le buffet, et le fauteuil à bascule, tourné de biais, semblait réservé pour quelqu’un, attendre son maître, se refuser aux visiteurs. Une glycine fleurie de lourdes grappes mauves enguirlandait la fenêtre ouverte.

— Vous rappelez-vous le temps de l’Hôtel-Dieu ? s’écria joyeusement Dina, comme c’est loin, n’est-ce pas ?

Thérèse, assise, rêveuse, les yeux mi-clos, étudiait curieusement la singulière métamorphose accomplie chez l’étrangère.

— Oui, je vous revois dans la salle, sous votre blouse, le stéthoscope à la main, parlant de bruits extra-cardiaques ou d’insuffisance mitrale… Ma petite Dina, vous avez changé !…

— Dieu merci !… Ça n’était pas drôle, ce temps-là, vous savez.