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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/413

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princesses de science

bonheur, elle le tient dans ses mains ; peut-être s’y croyait-elle autorisée par mon peu de soin à le conserver. Mais, que feriez-vous, madame, si une femme en avait usé pareillement à l’égard de votre cœur, de votre amour, du mari que vous aimeriez passionnément ?

Elles étaient aussi blanches l’une que l’autre, et baissaient la tête toutes deux.

Madame Jourdeaux dit timidement :

— Peut-être serais-je allée trouver cette autre femme en toute loyauté ; et, si elle n’était pas coupable, si elle n’avait à se reprocher qu’un sentiment très pur, sans faute, sans tache, elle m’aurait reçue comme une amie. D’aimer le même homme, nous aurions pu beaucoup souffrir ; mais, moi, je ne l’aurais pas méprisée…

— Oui, dit Thérèse rêveusement, vous auriez eu raison…

Elles se regardèrent. Des larmes jaillirent de leurs yeux.

Thérèse ajouta :

— Je ne suis plus médecin. J’ai voulu donner à celui qui me délaissait cette preuve suprême d’amour de lui sacrifier la moitié de ma vie. Mais si petite est maintenant la place que je tiens dans ses pensées qu’à peine a-t-il pris garde à mon acte. Ainsi le déchirement que j’ai subi, et que vous ne pouvez comprendre, madame, — car il m’a semblé commencer de mourir en cessant d’être ce que je fus jusqu’ici, — ce déchirement