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princesses de science

crètes études. Vous êtes l’amie de madame Lancelevée, la doctoresse de la Présidence : voyez-la dans son laboratoire. Vous aussi…

Elle l’interrompit, indignée :

— Un laboratoire ! Voilà ce que vous m’offrez ? J’ai rêvé l’incomparable activité du médecin, le contact avec toute une humanité : ce petit monde complet qu’est la clientèle et dont on se fait à la fois l’ami, le maître moral et le sauveur. Comme champ d’expérience, j’ai voulu le corps humain vivant, vibrant et souffrant. J’ai ambitionné le rôle du guérisseur. Je me crois destinée à cette mission de combattre la souffrance humaine. Véritablement je me sens des énergies suffisantes pour cette vie intense et féconde qui vaut dix autres vies de femmes. Et j’aboutirais à la réclusion dans le laboratoire ou le cabinet de travail, avec quelques fioles où se nourriraient des bacilles, des réactions micrographiques de cellules, un peu de vie chimique, et la pathologie sous forme d’in-octavo ornés de figures coloriées hors-texte, n’est-ce pas ?… Non !… Guéméné, vous me connaissez bien mal pour me proposer cela. Il me faut l’exercice de ma science, la pratique médicale, et non pas de stériles études. L’hôpital me magnétise, le malade m’attire. Je veux le vrai succès, le triomphe propre du médecin : la victoire sur la mort.

Ils s’étaient avancés, en marchant, vers le pont Notre-Dame. À cet instant, tous deux s’arrêtèrent. Thérèse toute pâle frémissait encore de l’excitation