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Stances à Thaliarque

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Stances à Thaliarque
J. Fort (p. 135-136).

STANCES À THALIARQUE


Laisse là les chagrins d’une vaine prudence,
Thaliarque, et n’en crois qu’à ton joyeux désir ;
Le présent est pour le plaisir.
Et l’avenir pour l’espérance.

Le présent est à toi, l’avenir est aux dieux ;
Ne les outrage pas en t’affligeant d’avance ;
Jouis de leurs bienfaits, crois en leur indulgence ;
Et contente-toi d’être heureux.

Celui-là seul, mortels, comprend sa destinée.
Qui, tout le long du jour, assis en un festin.
Jouit gaîment de sa journée
Sans nul souci du lendemain.

Vois ce stoïcien, malheureux qu’on admire.
Il nous regarde, armé d’un œil indifférent ;
Il nous insulte d’un sourire.
Et se détourne en soupirant.

Te verrons-nous toujours, avec un soin frivole.
Épargner ces trésors par ton père amassés ?
Lycus ? quoi ! crains-tu donc qu’il ne t’en reste assez
Pour payer ta dernière obole ?


Buvons, rions, chantons, soyons des fous heureux !
N’attendons pas, amis, que la pâle vieillesse
Vienne, ridant nos fronts joyeux.
Nous condamner à la sagesse.

Pour moi, toujours fidèle au doux dieu des chansons.
Je veux de la mort même égayer l’arrivée.
Et parer en riant de mes derniers festons
Sa faux sur ma tête levée.

E. Hugo[1]
  1. Conservateur littéraire, tome Ier, 3e livraison, pp. 84-75.