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Vues Scripturaires sur la Question des Anciens/VII

La bibliothèque libre.
Georges Kaufmann, Libraire (p. 67-70).

VII.

Pour moi, je ne suis pas dans cette difficulté.

L’Apôtre Pierre parle des Anciens d’une manière qui n’implique nullement l’idée d’une nomination officielle. « Moi qui suis co-Ancien, dit-il, j’exhorte ceux qui parmi vous sont des Anciens (1 Pierre, V, 1). De la même manière, vous qui êtes plus jeunes (πρεσβυτέροις, νεώτεροι), soumettez-vous aux Anciens. »

Au XVMe chapitre des Actes, nous trouvons aussi, dans l’assemblée de Jérusalem, des Anciens, dont l’établissement n’est rapporté nulle part, mais qui sont là sur le pied sur lequel Pierre les place expressément dans son épître.

Je trouve, dans l’épître aux Hébreux, des conducteurs reconnus à leur œuvre. De sorte que je ne doute nullement qu’au milieu des chrétiens d’origine juive, l’ancienneté ne fût purement une affaire morale.

Dans la première épître aux Thessaloniciens, je vois que l’Apôtre engage les fidèles à prendre connaissance de ceux qui travaillaient parmi eux, et qui allaient devant eux, et il les exhorte à les estimer beaucoup à cause de leur travail, motif plus moral que dépendant de leur âge, quoique, je n’en doute pas, cela y entrât aussi, sauf des cas exceptionnels.

Dans l’épître aux Romains, je vois des personnes qui vont devant, des fidèles qui, dans ce sens, étaient à la tête des autres, et qui, à leur tour, sont exhortés à s’en acquitter avec diligence, de même qu’il avait dit aux Hébreux qu’ils veillaient sur leurs âmes.

On lit dans la première épître aux Corinthiens, XVI, 15 : « Je vous exhorte, mes frères (vous connaissez la maison de Stéphanas ; vous savez que ce sont les prémices de l’Achaïe, et qu’ils se sont adonnés [voués d’une manière régulière] au service des saints), que vous soyez soumis à de telles personnes, et à chacun qui travaille et se donne de la peine. »

J’ai donc, dans la Parole de Dieu, des autorités très claires pour reconnaître ceux qui se trouvent dans la position en question ; j’ai des règles pour ma conduite à leur égard, et pour leur conduite au milieu du troupeau. J’en profite, et les troupeaux sont appelés à en profiter. Ils peuvent le faire, sans prétendre à être le troupeau de Dieu[1], tandis qu’un grand nombre de fidèles resteraient en dehors de leur réunion, et de ce nombre, peut-être, ceux qui seraient véritablement les Anciens si tous étaient rassemblés ; et ils peuvent le faire sans fausser leur position d’une manière très grave, ce qui arriverait s’ils prétendaient être ce qu’ils ne sont pas ; ils peuvent le faire sans établir ce que Dieu devrait mettre de côté, s’il faisait une œuvre plus complète ; car cela les constituerait en secte. Ils peuvent jouir, selon Dieu, de tout ce que Dieu leur a donné, sans nier l’état de ruine de l’église visible, état qui a mis le désordre partout, et dont l’oubli démontre, hélas ! que la conscience n’est pas atteinte par ce qui tient de près au cœur de Christ, et qui devrait nous être profondément douloureux.

L’auteur du traité Faut-il établir des Anciens ? nie la possibilité d’obéir aux passages que nous venons de rappeler.

Je suis profondément convaincu que le fondement ainsi posé dans la Parole est le fondement le plus sûr, et que la marche, qui se dirige en conséquence, est la vraie marche.

Ainsi, je puis respecter, selon la mesure de leur travail, ceux qui ne sont pas pleinement manifestés selon ce qui est exigé pour la charge, et sans élever, dans une position nuisible pour lui-même, position qu’il ne pourrait remplir au profit des autres, celui qui ne possède pas toutes les qualités exigées pour cette charge.

§.

Exiger l’établissement des Anciens, c’est aussitôt se plonger dans toutes sortes de questions au sujet de leur établissement ; il faut cacher son impuissance sous de belles phrases, et tomber dans un dédale de tâtonnements qui aboutissent toujours au clergé.

Qui les choisira ? Qui les établira ? Qui leur imposera les mains ? Si l’on n’est pas d’accord, voilà une nouvelle secte.

Dès le commencement, les frères ont agi selon le principe que j’ai tiré plus haut de la Parole de Dieu. Peut-être, en quelques endroits, ne tirent-ils pas de ces passages le profit qu’ils pourraient. Je crois, d’ailleurs, qu’à mesure de la déchéance de l’Église, les Anciens étaient plus en scène. Mais, dès-lors, tout est changé. Il s’agit maintenant de recommencer ; et la nomination officielle fait surgir la question de savoir qui la fera cette nomination, question à laquelle la Parole de Dieu ne vous répondra qu’en vous faisant sentir l’absence de ceux dont l’autorité pouvait la résoudre. Non qu’ils la résolussent par une révélation, nous la possédons tout entière, mais par une autorité qui leur avait été confiée et que vous ne possédez pas. La prétention de l’exercer est, ou bien le joug du papisme, ou bien le désordre de quelques-uns qui en imposent, et qui en imposent uniquement à ceux qui les suivent.

Et même, sont-ils d’accord entre eux ?

Loin de là. Si on les consulte, je ne saurai lequel écouter.

L’un me dit que tout est libre ; que la Parole ne fait pas loi.

Un autre me dit : Elle fait tellement loi que je ne puis obéir qu’en nommant des Anciens.

Un troisième me dit : Pasteur et Ancien sont la même chose.

Non, dit un quatrième. Je vous assure que l’examen de la Parole démontre le contraire.

Un cinquième allègue que le mot grec, qui signifie choisir, veut dire : faire voter les autres.

C’est une erreur, s’écrie un sixième.

Enfin, on clôt l’entretien en me disant que, si je ne me joins pas à eux, je suis désobéissant et schismatique.

À qui me joindre, je vous prie ?

À nous tous.

D’après quel principe ?

Nous sommes tous d’accord.

  1. Je ne fais pas d’objection à ce que le troupeau soit appelé église ; sinon la crainte que, à l’imitation de l’ancienne dissidence, il ne se fasse l’idée qu’il est l’église de l’endroit. La Parole reconnaît tous les chrétiens d’un lieu comme formant l’Église de ce lieu.