Aller au contenu

Guillaume Couture, premier colon de la Pointe-Lévy/9

La bibliothèque libre.
Texte établi par Tremblay & Dion, Inc., Mercier et Cie (p. 150-157).

IX

La descendance de Couture s’allia aux meilleurs partis. En groupant les noms, on trouve rassemblés par les alliances : Couture, Nicolet, Marguerie, Olivier le Tardif, Marsolet. Ceux qui avaient couru ensemble les mêmes dangers sentaient naître entre eux des sympathies qui ne pouvaient plus se rompre. L’amitié contractée au milieu des bois se continuait au foyer, dans les relations heureuses de la vie domestique.

L’aîné des enfants de Couture, Jean-Baptiste, né en 1660, se maria à l’Ange-Gardien avec Anne Marette. Il paraît s’être établi dans l’île d’Orléans.

Anne, née à Lévis le 22 janvier 1652, baptisée à Québec le 10 avril, eut pour parrain M. de Repentigny, lieutenant du gouverneur de la Nouvelle-France, et pour marraine Anne Desprez, l’épouse du grand sénéchal Jean de Lauzon. Elle épousa en 1669, Jean Côté, qui avait eu pour mère une des filles d’Abraham Martin dit l’Écossais, pilote royal, un des premiers propriétaires à Québec. Martin a eu l’honneur de léguer son nom au champ de bataille où se rencontrèrent les armées de Wolfe et de Montcalm : les Plaines d’Abraham… Une des filles d’Anne Couture fut religieuse hospitalière sous le nom de mère saint Paul. Son fils ainé, Jean-Baptiste Côté, devint seigneur de l’île Verte.

Le troisième des enfants de Couture, Louis, est né en 1654. Les registres ne mentionnent que son baptême. Marguerite, née en 1656, épousa Jean Marsolet, un des fils du célèbre interprète Nicolas Marsolet.

L’époux de Marguerite Couture était sieur de Bellechasse. Il a donné son nom à cette partie de la côte du sud du Saint-Laurent, aujourd’hui Berthier de Bellechasse. Marguerite Couture est morte en 1690 sans laisser de postérité.

Marie, née en 1658, épousa en premières noces (1678) François Vézier dit La verdure qui mourut en 1683, le 7 juin, sans laisser d’enfants. Vingt-et-un jours après la mort de Vézier, Marie Couture épousait Claude Bourget, bourgeois de Québec.

Charles, né en 1660, épousait en 1690, Marie Huard, fille de Jean Huard, procureur fiscal de la seigneurie de Lauzon. C’est l’ancêtre des Couture dit Lafrenaye.

Guillaume, né en 1662, épousa Marie-Madeleine Côté.

Louise, née en 1665, fut l’épouse (1688) de Charles-Thomas Couillard, seigneur des Îlets et seigneur de Beaumont. C’est la souche des Couillard de Beaumont, Charles-Thomas Couillard était le neuvième enfant de Guillaume Couillard qui fut, avec Hébert et Martin, le premier à coloniser le rocher de Québec. Par ce mariage Louise Couture devenait l’alliée de Jean Nicolet, de François Bissot, d’Olivier le Tardif et de Jacques de la Lande. Une des filles de Louise unit son sort à un Morel de la Durantaye. Le mariage de Louise Couture nous fournit un exemple des bizarres relations de parenté qui peuvent se rencontrer parfois dans un pays peu populeux et où les alliances roulent dans un cercle nécessairement restreint. Olivier le Tardif, lorsqu’il maria Barbe Aymart, belle-sœur de Guillaume Couture, était veuf de Louise Couillard, belle-sœur de Louise Couture. Celle-ci, nièce d’Olivier le Tardif, était aussi sa belle-sœur.

Eustache Couture, né en 1667, est la souche des Couture dit Bellerive. Il se maria, en 1695, à Marguerite Bégin, fille de Louis Bégin, un ancien colon de la Pointe de Lévy. Françoise Huard, fille de Jean, fut sa seconde femme.

On a vu, en cette même année 1695, le vieux Guillaume Couture assister au mariage du plus jeune de ses enfants, Joseph-Odger, né en 1670, avec Jeanne-Marie Huard. Joseph-Odger Couture porta le nom de Couture de la Cressonnière. C’est de lui que descend l’honorable George Couture, conseiller législatif de la division de Lauzon.

Les descendants de Guillaume Couture sont très répandus, surtout dans le district de Québec et dans celui de Gaspé.

Dans le seul comté de Lévis, le clan de Couture comprend, en 1884, cent douze électeurs.

Monseigneur Turgeon, archevêque de Québec, et Mgr Bourget, ancien évêque de Montréal, descendent par les femmes, du compagnon du père Jogues[1].

Guillaume Couture devait donner à ses fils le goût des voyages et des aventures. Onze ans après son expédition à la baie d’Hudson, en 1672 ; un de ses fils[2] se dirigeait vers ces mêmes parages. L’intendant Talon, apprenant que les Anglais renouvelaient leurs prétentions sur ce territoire abondant en fourrures précieuses, résolut de ne point négliger ce pays limitrophe du Canada. La mission d’aller reconnaître ces lointains pays fut confiée au père Albanel, ancien missionnaire de Tadousac, à M. de Saint-Simon, gentilhomme canadien, et au fils Couture. Partis de Tadoussac, bien fournis par l’intendant de tout ce qui était nécessaire au succès du voyage, les voyageurs remontèrent le Saguenay pour suivre la route par où les sauvages du nord descendaient de la baie d’Hudson. Après avoir hiverné au lac Saint-Jean, les trois Français en repartirent le 1er juin 1672, conduits par seize sauvages. Le vingt-huit du même mois, ils rencontrèrent à l’entrée d’un petit ruisseau une berge de dix ou douze tonneaux qui portait le pavillon anglais et la voile latine. Pour se dérober à l’ennemi, ils se cachèrent dans une maison déserte. « Enfin, ils purent apercevoir cette mer qu’ils avaient tant recherchée ainsi que la fameuse baie d’Hudson et, le neuf de juillet 1672, ils y arboraient les armes du Roi. Le 18, ils arrivèrent à une autre rivière, où ils étaient attendus de 200 sauvages et, le lendemain sur les deux heures de l’après-midi, ils plantèrent les armes du Roi pour servir de sauvegarde à tous ces peuples contre les Iroquois[3]. » Dans un grand conseil, le père Albanel expliqua le but de son voyage aux naturels du pays et leur fit des présents. D’après l’abbé Ferland, les voyageurs étaient de retour au lac Saint-Jean à la fin de juillet.

Au printemps de 1687, le fameux explorateur de la Salle, s’en allant à la recherche de l’embouchure du Mississippi, fut lâchement assassiné dans les bois par trois de ses compagnons de voyage. Son frère Cavelier, qui le suivait avec un de ses neveux et le père Anastase, découragé, perdu dans un pays inconnu, sans ressources, résolut de se rendre aux Illinois. Le 20 de juillet, comme les voyageurs arrivaient au pays des Arkansas, ils rencontrèrent deux français, l’un nommé Delaunay et l’autre nommé Couture. Ils avaient été envoyés aux Arkansas par le chevalier de Tonti, au retour d’un voyage qu’il avait fait lui-même jusqu’à l’embouchure du Mississippi où de la Salle lui avait donné rendez-vous. Ils paraissaient décidés à s’établir en ce lieu, n’attendant plus aucune nouvelle de M. de la Salle, dont Cavelier leur apprit la mort tragique. Couture se décida à les accompagner. Ils partirent le 27, descendirent la rivière des Arkansas et, le même jour, virent pour la première fois le Mississippi. Le 22, leur conducteur Couture prit congé d’eux[4].

Ce Couture doit vraisemblablement être Louis, le troisième des enfants de Guillaume, dont on trouve le baptême aux registres, sans aucune autre mention. Nous laissons aux antiquaires qui s’occupent de l’histoire des Canadiens de l’Ouest, le soin de rechercher ce qu’est devenu cet enfant prodigue.

Tous les autres enfants mâles du premier colon de la Pointe de Lévy ont fait souche et leur descendance est répandue dans la province. En 1725, le cadet de la famille, Joseph-Odger Couture, était capitaine de milice de la côte de Lauzon[5].

En 1751, c’est à un Couture que l’intendant Bigot donnait l’ordre de se rendre au fort de Frontenac pour y construire un bâtiment pour le service du roi[6].

Voyageur, colon, capitaine de milice, maître charpentier du roi, chacun des fils voulut conserver la bonne renommée du premier colon, Guillaume Couture.

  1. L’abbé Ferland, Histoire du Canada, p. 317, tome I.
  2. Les anciens manuscrits nous disent un fils du sieur Guillaume Couture, sans donner le nom de baptême. Ce dut être l’aîné, Jean-Baptiste, qui avait alors 22 ans.
  3. Relation de 1672.
  4. Ferland, tome II, page 173.
  5. Ordonnance des intendants, 1725 p. 82.
  6. Ordonnance des intendants, 4 mai 1751, vol. 38, p. 68. Voir appendice.