Le Vampire (Morphy)/77

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J.-M. Coustillier, éditeur (p. 445-447).

CHAPITRE XIII

Les deux trésors.

Autour de la maison de Noisy des ombres se mouvaient.

Quelques sourds chuchotements troublaient le silence de la nuit.

— Allons, fit tout à coup une voix brève et métallique, c’est le moment. Toi, Zim-Zim, tu me suivras sans bruit. Vous autres, restez ici jusqu’à ce que vous entendiez le cri de la chouette… Comme ceci…

Et l’homme imita le cri de l’oiseau nocturne.

La villa était entourée d’un mur.

Sur le devant se trouvait la grille d’entrée.

Par derrière était une petite porte.

C’est de ce côté, que l’assaut allait être donné.

On a deviné Caudirol et sa bande.

En effet, le bandit avait fixé pour ce soir-là l’exécution de son plan.

Lydia devait être arrachée à ses protecteurs.

Caudirol se dirigea vers la petite porte suivi de Zim-Zim.

Il mit une clé dans la serrure et la tourna deux fois : le pêne joué aussitôt.

— Sacrais avait raison, fit le bandit, il vaut mieux procéder ainsi : sa clé fait merveille.

Et il traversa le fond du jardin.

Une pièce du premier étage était encore éclairée.

— Fais-moi la courte échelle, Zim-Zim, dit Caudirol.

— Voilà, patron,

Zim-Zim se plaça contre le mur les mains assemblées.

Caudirol se hissa lestement jusque sur ses épaules.

Sa tête se trouvait à la hauteur de la fenêtre. Il ne pouvait rien voir à l’intérieur.

Il fallait se hisser à l’appui.

Comme il allongeait sa main, il sentit la fenêtre s’ouvrir légèrement sous sa pression.

Elle n’était pas fermée.

Il allait s’élever à la force des poignets quand le bruit d’une conversation frappa ses oreilles.

— Alors, disait une voix, c’est là que les millions sont déposés.

— Oui, répondit une autre voix. C’est dans l’allée que je t’ai dit, au Père-Lachaise.

Et la personne qui parlait répéta le nom de l’allée à plusieurs reprises.

— C’est bien ; cela me suffit.

— Tu trouveras facilement.

— Eh bien ! c’est entendu ; dès demain, je vais au cimetière ; je cherche l’allée en question ; je prends ensuite la contre-allée, à droite, et je trouve le vieux caveau abandonné dont la porte ne ferme plus.

— La serviette contenant les valeurs se trouve cachée sous l’autel.

— Parfait. Et là-dessus, je vous, souhaite le bonsoir. Vous devez avoir besoin de repos. Je vais faire une petite ronde et me coucher, moi aussi.

— À demain, mon ami.

Caudirol saisit l’appui de la fenêtre et se hissa vigoureusement.

Il put voir à l’intérieur…

La porte se refermait.

Un homme était couché dans un grand lit de fer, sans rideaux.

Le bandit reconnut ses traits avec terreur.

— L’homme du Père-Lachaise ! Le Docteur-Noir ! Mais je le croyais en prison…

Lucien Bartier allait s’endormir.

Cependant il sentit le filet d’air qui pénétrait dans la pièce,

— La fenêtre n’est pas fermée, fit-il.

Et d’un bond il sauta hors du lit.

Caudirol se laissa glisser jusqu’en bas.

Mais le bruit de sa chute frappa l’oreille du Docteur-Noir.

Il se pencha au dehors et vit deux hommes qui s’enfuyaient.

— Ah ! ah ! on se préparait à nous enlever la petite. Coup manqué, ma foi.

Il ne supposa pas que l’un de ces bandits avait entendu sa conversation avec Jean-Baptiste Flack.

Caudirol et Zim-Zim rejoignirent leurs camarades.

— L’alarme est donnée, fit-il. Retirons-nous. Ce sera pour une autre fois.

Et en lui-même, il pensait.

— Je n’ai pas de temps à perdre si je veux profiter de ce que j’ai entendu. Il faut que je devance mon bonhomme. Probablement qu’il sera là demain matin à l’ouverture des portes. Moi, je ne suis pas si fier, je passerai par-dessus le mur.

Le bandit jouait de bonheur.

Le trésor du château de Lormières et celui du Père-Lachaise, caché par le Docteur-Noir, étaient à lui !

Il se sépara de ses hommes après avoir dit quelques mots à Sacrais.

— Très bien, fit celui-ci, à neuf heures, demain matin, je serai à la gare et nous partirons pour Nantes ensemble. Cela me va.

FIN DE LA TROISIÈME PARTIE