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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/102

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

de Chersonèse où nous l’avons fait reléguer par Léon, à si grande peine. Voilà ce que les espions m’apprirent tout à l’heure, et ce pour quoi je suis venu vers ton trône. Là-bas les légions ne t’apprécient guère, ni nous. Leur Lachanodracon vient de tuer le frère d’Othman et de disperser cinquante mille Sarrasins. Cela le comble de suffisance. Accepteront-ils, les vainqueurs, que la balance et l’épée demeurent aux mains d’une femme ? Qu’ils lèvent le camp, qu’ils marchent sur Byzance, aux ordres du César Nicéphore ? Ils satisferont tous les mécontents qui t’accusent d’avoir empoisonné le Copronyme, et d’avoir tué Léon dans les débauches. Car ces gens-là ne veulent pas rendre aux monastères les biens volés, car leur commerce périclite depuis que les soldats ne leur vendent plus les images sacrées à bas prix. Grégoire le logothète du Drome Bardas, le stratège des Arméniaques, Constantin, le domestique des Excubiteurs, tous ceux-là, dis-je, offriront au César les souliers de pourpre et le sceptre, s’ils ne nous redoutent unis contre eux, et plus forts ici que les séditions intérieures… Or, que Ta Toute Puissance nous supprime, et l’École des philosophes entière s’enfuira, laissant le Palais avec son peuple de fonctionnaires, et l’Hippodrome, avec les passions de ses foules sans directeurs écoutés de leur conscience. Alors il y aura bien des ambitieux pour attribuer la régence au César, et pour recevoir, en retour, des charges et des titres.

Il s’arrêta tout essoufflé. La sueur coulait le long de ses joues.