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IRÈNE ET LES EUNUQUES

a toujours raison. Je suis un âne, un âne ; et tu me mènes avec le bâton.

Il proféra ces derniers mots en partant. Toutes deux le virent qui courait presque dans l’essor de ses manches dorées, et qui soulevait la poussière avec ses bottines rouges. Il gesticula beaucoup avant de disparaître.

Dès qu’il fut loin, sa femme s’éplora davantage, s’étant alanguie près d’Irène qui songeait :

— Pourquoi cesses-tu de m’aimer, Despoïna ? Pourquoi retires-tu ta main de ma main ?

— Tant que ta vie fut un espoir pour Byzance,… avouait Irène, douce et sérieuse,… je la chérissais. Si tu deviens un obstacle au triomphe, je me dresserai contre toi !

— Alors, je ne fus rien qu’un instrument pour ta force… questionna l’épouse avec une humilité infinie ?

Irène s’humilia davantage :

— Moi-même je ne suis que l’instrument d’une pensée.

— Tu le dis !

Alors, évoquant les tristesses de sa mémoire, l’Athénienne soupira :

— Tu me juges sans équité.

— Pour la grandeur de l’État, tu sacrifierais ton fils lui-même, toi !

Irène, lentement, attira Marie contre sa poitrine et lui murmura d’une voix grave.

— Rien n’est plus haut que la grandeur d’une idée…