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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/33

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

toutes, par le monde, comme le but des espoirs les plus téméraires.

Pourtant Irène hésitait devant sa voie. Déjà son cœur véritable, celui que ne commandaient ni la science, ni l’orgueil, son cœur avait dédié au Mesureur de l’Abyme la volupté fervente de ses songeries, celles qu’enivraient les chaudes caresses de l’air, quelques strophes de Sappho fidèles à la mémoire, certaines influences des couleurs pourpres étalées sur le large roc de l’Acropole, et tous les souvenirs des mythes anciens survivant parmi les colonnes du temple de Thésée. Amoureuse, elle se demandait si le mieux n’était pas de chérir Jean. Ah, douceur de baiser cette chevelure noire et bleuâtre, de caresser, avec tout un corps de vierge ardente, cette poitrine gonflant la tunique de byssus ! Enlacer ce cou, ce cou fort et bref rapprochant la pensée et le souffle qui la crie, la volonté et les bras qui la servent.

Anxieuse, Irène s’épuisait, un matin, dans le doute.

Un fruit tomba de l’arbuste.

Jean Bythométrès dit :

— D’une part, je n’ai pas coutume d’insulter à la pudeur de tes pensées, en les devinant à haute voix, bien que je pense les apprendre d’après les mouvements de tes yeux, les vivacités de tes mains, et les masques successifs que fabrique ton visage pour ton âme. D’autre part, je ne puis céler davantage mes blâmes que tu as prévus en examinant ma mine quand ma voix te réprimandait par le ton, tandis que, par