— Que tenter contre la force des soldats ?… demande un Arménien… Compte les blessés déjà !
Aidé par son esclave, Alexis gravit les marches qui servent de soubassement à la colonne, et, de là, discourt, un bandeau noir sur les paupières :
— Romains, derrière ces murs, des bourreaux aveuglent votre empereur pour qu’il soit comme nous, à tâtons, un prophète dérisoire de vos maux.
— Bavardes, écoutez ce que disent les Aveugles…, enjoint aux autres femmes la courtisane impatientée.
— On n’aveugle pas seulement l’empereur, mais l’empire…, assure Damianos en sa barbe rousse.
— Périssent les eunuques !… souhaite la foule.
Et les clameurs du peuple que les gardes refoulent au fond des rues se font plus terribles.
— On ne vous dit pas tout…, avertit Pierre… On ne vous dit pas que la Très Pieuse Irène, cédant aux sollicitations du pape latin, médite de s’unir à Karl le Franc.
Un barbare aux braies vertes et aux tresses blondes s’embarrasse en réfutant mille questions brusques.
— Mon maître révère la Très Pieuse Irène qui, contre l’hérésie des iconoclastes, redressa les images du Christ et de sa Sainte Mère !
— L’aigle romaine s’envolera vers les Gaules ?… annonce Alexis, au peuple furieux dont les rumeurs indignées répondent.
— Karl veut asservir le monde !…