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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/384

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

— Il a une langue d’or, en vérité, ce logothète… admire l’arménien zébré d’or.

Les applaudissements s’élèvent au-dessus des têtes halées :

— Langue d’or… continue, langue d’or. Tu parles comme la Sainte Sagesse.

— Aussi,… oppose Alexis,… ne tentera-t-il aucune innovation !

— Que penserais-tu, ô Alexis, de celui-ci ?… poursuit Nicéphore… Un homme assistait aux jeux de l’hippodrome. Tel serviteur vient lui dire que le feu enveloppe sa maison. L’homme accourt précipitamment, le cœur plein de tumulte. Il voit que le feu a embrasé l’étage supérieur ; mais le fléau n’entame pas encore les auvents du bas, ni l’atrium, ni la boutique qui contient les richesses, les jarres d’huile, les tissus précieux, ni l’étable aux mules. Si, voulant châtier l’imprudence de sa femme qui a laissé le tison près de la courtine et allumé la flamme, si cet homme-là, dis-je, met le feu à la boutique, à l’auvent et à l’étable, soutiendras-tu, ô Alexis, qu’il sied d’agir de la sorte ? Diras-tu qu’il sied d’incendier toute la maison afin de punir la sotte qui alluma un pan d’étoffe ?…

Des rires flatteurs et unanimes accueillent les paroles du logothète cambré dans son uniforme coruscant.

— Tu ne le peux pas dire, n’est-ce pas, Alexis ? Et cependant, voilà ce que tu proposes aux Byzantins ?

Un orage de bravos l’empêche un instant de continuer.

— Salut, langue d’or !… Logothète admirable ! Salut !