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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/45

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

Ainsi tout était vrai des martyrs, des sacrifiés, de ceux que l’histoire approuve parce qu’ils étouffèrent leur cœur, parce qu’ils égorgèrent la meute de leurs sens aboyants. Cet homme avait anéanti son pouvoir d’aimer et d’être adoré, pour que l’Idée fût transmise, par la disciple Irène, dans l’esprit de l’Autocrator, pour que cette pensée soumît l’Orient et l’Occident, dût-il languir lui, objet d’opprobre et de dérision, avec sa tristesse confidente.

Éperdue, en pleurs, l’élue des évêques et des princes promit d’obéir au maître de son esprit navré.

— Je serai ta chose, ô Mesureur de l’Abyme !… Que ta volonté saisisse mon intelligence comme ma main impériale bientôt saisira le sceptre.

En silence, il se retira sans qu’elle voulût faiblir en le regardant. Elle demeura, prostrée contre terre, avec les angoisses de son âme, pour deviner l’avenir de leurs vœux doubles.

Par delà les parvis de la basilique, l’attendaient le trône, les gardes, la couronne aux deux rangs de perles, aux longues bandelettes chargées de joyaux et qui battent, dans les cérémonies, sur l’incarnat avivé des joues. Vers sa personne symbolique s’exalteraient l’enthousiasme de la foule sujette, et les acclamations des dignitaires. Elle ne résista plus. Elle se promettait supérieure, avec le secours de Jean, aux plus rudes esprits, aux témérités altières. Possédant le levier d’une suprême puissance, elle modifierait le monde selon le gré de leurs théories philosophiques. À la