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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/460

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

— Votre pays ne sera plus qu’une petite province de l’empire franc ! Notre Très Pieuse Irène se laisse tromper par la fourberie des Latins, comme elle se laissa tromper par les trahisons de Staurakios. Méditez ceci, gens de Byzance !… La politique de Karl vise à l’asservissement de tous les peuples… Voilà longtemps déjà qu’il prépare la machination prête à réussir aujourd’hui… Rappelez-vous le bruit qui courait du temps où notre Constantin divorça… On soupçonnait déjà les desseins du pape et de ses barbares. Qu’ils l’emportent ; et l’empire des basileis ne sera, pour le Franc, qu’une terre étrangère, qu’une terre conquise dont la fertilité comme les commerces enrichiront l’Occident. Pleurez tous, l’aigle romaine va s’envoler vers les Gaules… Nous avons cru pouvoir obéir à une femme, sublime à la vérité. Ce fut notre erreur. Nous sommes devenus sa dot. Elle apporte à son époux vos villes pour meubles, vos âmes pour esclaves, vos contrées pour tapis, vos églises pour reliquaires !… Tout cela va parer la maison de Karl.

La multitude et l’élite acceptèrent aisément ces raisons parce que, dépendant d’une faction organisée et apte à s’emparer du pouvoir, chacun se pensait à la veille du triomphe. Si le mariage se consommait, la chance disparaissait d’acquérir une charge lucrative au cours de troubles successifs. Tel fut le calcul parmi les politiques.

En vain Bythométrès et Tarasios prêchèrent-ils que, loin de réduire le vieil empire des Césars en province