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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/491

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

s’occupa de lui découvrir un meilleur gîte. Mais le gouverneur de Mitylène n’osa point en désigner de peur que Nicéphore le destituât. Toutefois, il fut convenu qu’on abandonnerait à l’impératrice la jouissance d’un temple payen, très antique, sis non loin de la forteresse, sur un étroit promontoire borné de trois côtés par l’abîme liquide.

Ce fut là qu’Irène, quelques mois encore, vécut. Elle n’y mourut pas solitaire. En ce même lieu d’exil, Bythométrès, Pharès, Aétios et Marie d’Arménie qui avait elle-même ameuté son monastère contre l’usurpateur du trône isaurien, furent déversés par une galère de Constantinople. À peu près folle, Marie parlait toute seule, continûment. Pharès agonisait. Aétios avait eu la dextre tranchée en se défendant contre les massacreurs de son frère dans l’isthme de Callipolis avec le dernier escadron de ses partisans. Bythométrès cachait son hydropisie sous une cagoule noire, et aussi les blessures suppurantes que lui laissaient les fers d’une détention consécutive à la révolte éphémère des Athéniens, admirateurs d’Irène.

Au bord de la mer violette, devant les lumières illimitées du ciel, parmi les plissures d’un terrain rose et jaune parsemé de myrtes, d’oliviers poussiéreux, les vaincus se navrèrent ensemble, conscients d’être à jamais exclus du monde glorieux. Ils abritèrent leurs lamentations et leurs silences plus lugubres sous le chaume qui recouvrait la toiture naguère béante du vieux sanctuaire. Onze Éphésiens échappés de la