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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/263

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

pris dans ces dernières années une véritable importance, grâce à la pêche de la sardine. De la fin de juin au commencement de décembre, il met en mouvement pour cette pêche huit cents bateaux, montés par trois ou quatre mille marins. Cette pêche rapporte annuellement douze millions de francs, environ.

» À cette hauteur de la côte, mais à douze lieues dans les terres, se trouve Carhaix, patrie de la Tour d’Auvergne, qui reçut de Napoléon, premier consul, le titre de Premier grenadier de France. Revenons au littoral.

» Camaret. — Servit longtemps d’avant-poste de refuge à la rade de Brest. — Allons-nous arriver à Brest ? fit miss Julia, montrant un peu d’impatience.

— Nous y voilà.

» Brest est le grand arsenal de la France sur l’Océan. Nous l’avons vu, ce port, par un jour brumeux, et il m’a paru triste et sombre, malgré son appareil militaire, ses forts échelonnés des deux côtés du Goulet, large de deux kilomètres, qui sert d’entrée à la rade ; malgré les camps retranchés armés de batteries qui défendent l’entrée de la ville par mer et par terre ; malgré les hautes constructions de son vaste arsenal, sa Corderie, qui est célèbre, ses cales couvertes. C’est peut-être même tout cela qui donne à la ville son air sévère. Brest n’a pourtant plus de bagne.

» En pénétrant dans le port, formé par l’estuaire de la Penfeld, on se trouve soudain dans une rivière sinueuse, entre deux coteaux à pente raide tout couverts d’édifices. Sur les hauteurs de la gauche est Recouvrance, dont les rues apparaissent échelonnées et tortueuses. Mais la rade est magnifique ; quatre cents vaisseaux pourraient y trouver un refuge. C’est là qu’est le vaisseau école des officiers de la marine française.

» De Brest, sortit en 1794 le vaisseau le Vengeur. Chargé, avec plusieurs navires de protéger un convoi de vivres, il lutta contre la flotte anglaise, beaucoup plus forte ; après un long combat, les marins du Vengeur voyant leur vaisseau désemparé, criblé de boulets et prenant l’eau de toutes parts, aimèrent mieux s’engloutir dans les flots que d’amener pavillon et de se remettre aux mains du vainqueur.

Yes ! fit Henry Esmond, assez mécontent de cette exaltation d’une gloire maritime française. Décidément, miss, ajouta-t-il ironiquement, votre journal n’est pas destiné à la publicité… en Angleterre.

— Je vous l’ai dit, se borna à répondre miss Kate.

— Il est écrit pour un Français, observa miss Julia, pour taquiner sa sœur.