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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/351

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

l’ouest et du midi sont flanqués de hautes tours, que naquit le Normand qui devait mener avec succès ses vassaux à la conquête de la Grande-Bretagne. Tout est étrange dans la vie du Conquérant. Il eut pour père Robert, duc de Normandie, assez mystérieux personnage pour devenir légendaire de son vivant, et mériter son surnom de « Diable» ; et sa mère était Ariette, la blonde fille d’un pelletier, la plus fraîche et la plus jolie parmi les jeunes citadines de Falaise.

À sept ans, par la mort de Robert le Diable, Guillaume devenait duc de Normandie.

« Ce fut, a-t-on dit, au milieu de gens de guerre, en parcourant ces rochers escarpés d’une nature si abrupte et si sauvage qui environnaient son berceau, que grandit l’enfant, qu’il apprit à braver les dangers et acquit ce caractère audacieux et entreprenant qui fit sa gloire, le rendit le premier homme de son siècle et immortalisa son nom… »

» Depuis tantôt un grand siècle, les Normands s’étaient établis dans l’ancien royaume de Neustrie ; sous le règne de ces habiles ducs de Normandie, la riche province était devenue la rivale heureuse du royaume de France. Affermis sur ce trône par leur prudence, heureux et fiers de commander aux plus braves soldats du monde, les ducs de Normandie avaient agrandi, au delà de toute mesure, cette autorité si bien commencée. Du dixième au onzième siècle, vous retrouvez en tout lieu et en toute occasion nouvelle ; l’influence normande : l’Italie leur appartient pour une bonne part, l’Allemagne et la Flandre sont intéressées, par des alliances, au règne de ces conquérants ; le Bas Empire a tremblé devant ces guerriers redoutables ; bientôt quand l’Angleterre sera conquise, vous verrez le Danemarck et la Suède, la Norwège et l’Espagne, l’Écosse et l’Irlande, dominés par l’autorité de ce vassal roi, devant qui la France s’incline avec crainte.

» Cette idée de la Grande-Bretagne à conquérir, avait fait battre le cœur de tous les ducs de Normandie, à commencer par Rollon lui-même. C’était là, pour nous servir d’une admirable expression de M. de Lamartine. « La dot que chacun d’eux apportait à la fortune de son duché… »

» Déjà à seize ans, le fils d’Arlette annonçait le grand politique et l’habile capitaine qui devait réaliser les rêves de sa maison. Sa taille haute et fière, son noble visage, son esprit pénétrant et vif, sa colère subite et terrible, ses longues rancunes, sa prévoyance, son courage, sa patience dans les temps difficiles, n’avaient pas échappé aux moins clairvoyants. Qui lui résistait, était brisé ; qui lui était ami, pouvait se fier à ses promesses. Entouré