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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Galiffet prit le commandement des deux brigades. Le général crie : Au galop pour charger ! Les clairons sonnent la charge, tous les officiers répètent : Chargez !

» Nos cavaliers se lancent avec impétuosité contre l’ennemi ; les balles, les obus, la mitraille ne peuvent ralentir leur élan. Courbés sur l’encolure de leurs chevaux, la tête droite, les yeux fixes, les éperons dans les flancs, les rênes courtes, revolver et sabre au poing, ils partent, ils se heurtent aux colonnes prussiennes ; ils ne sabrent pas, ils pointent. Ils culbutent la première ligne ; mais ils vont se briser sur la seconde. Le feu terrible des bataillons prussiens met le désordre dans les escadrons ; broyés, ils viennent se replier derrière l’infanterie de Pellé et de Lheriller pour se reformer et s’élancer de nouveau…

» Mais cette infanterie, démoralisée par la puissance formidable de l’artillerie ennemie, n’a plus son ardeur ni sa solidité. Ducrot ne réussit pas à la reporter en avant. Alors il demande un nouvel effort aux chasseurs et aux hussards de Galiffet. Trois fois les charges sont recommencées, la dernière avec des lambeaux d’escadrons qui ne peuvent arrêter qu’un moment la marche en avant de l’ennemi. Nos cavaliers sèment la terre de leurs morts et de leurs blessés, laissant dans la mêlée le général Tillard, le colonel Cliquot, du 1er chasseurs d’Afrique, les lieutenants-colonels de Gantés et de Linières, tués, le lieutenant-colonel Ramond, grièvement blessé, vingt-deux officiers du 1er hussards, tués ou blessés ; charges héroïques, mais impuissantes qui arrachèrent au roi Guillaume, placé de l’autre côté de la Meuse, sur les hauteurs de Frénois, d’où il apercevait distinctement cette partie du champ de bataille, un cri d’admiration, et peut-être de regret, en voyant s’accomplir ce sacrifice de tant d’existences.

» Des soldats qui savent aussi bravement payer de leur personne, peuvent succomber sans honte. Les chasseurs d’Afrique et les hussards des valeureuses charges de Sedan, n’ont pas acquis en cette journée des titres moins glorieux à notre estime que les cuirassiers de Reischoffen.

» Encore une fois, mes amis, honneur aux braves ! »