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Page:Annales du Musée Guimet, tome 18.djvu/15

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XI
introduction

s’efforçant à travers les âges, — la justice d’outre tombe dominant, réglant, déterminant les destinées individuelles : nous avons un Avadâna.

Définition et nature de l’Avadâna. — Je définis donc l’Avadâna : une instruction destinée à rendre palpable le lien qui rattache les événements de la vie présente aux actes accomplis dans des existences antérieures, le présent étant considéré comme le produit du passé. Ainsi tout Avadâna se compose essentiellement de deux récits : le récit d’un événement actuel, le récit d’un événement passé qui l’a déterminé. Ce second récit, qui exige une connaissance complète des choses d’autrefois, ne peut pas être fait par le premier venu. Il n’y a que ce Buddha omniscient qui puisse évoquer de tels souvenirs ; et, comme ce Buddha est essentiellement un docteur, l’explication qu’il donne est nécessairement suivie d’une leçon, d’un précepte, d’une instruction appropriée, qui répond à la morale de nos fables. Un Avadâna se compose donc de ces quatre parties : 1o un préambule, qui exalte plus ou moins le Buddha en faisant connaître le lieu de sa résidence ; 2o un récit du temps présent, fait par un narrateur quelconque ; 3o un récit du temps passé, expliquant le récit du temps présent et fait par le Buddha ; 4o une conclusion, qui est le précepte donné par le Buddha à l’occasion des faits dont il vient d’être témoin et des souvenirs qu’il vient de rappeler. Il y a, dans la littérature bouddhique, un très grand nombre de récits faits suivant ce plan.

L’Avadâna est donc un genre bien caractérisé ; et je ne puis me ranger à l’opinion de Burnouf qui a cru voir, dans les recueils d’Avadânas, le Vinaya (ou la Discipline) du canon népâlais. Le Vinaya est proprement l’ensemble des règlements donnés à la Confrérie bouddhique par son fondateur. Il est vrai qu’on y peut faire entrer et qu’on y a fait entrer bien des choses étrangères à cet objet spécial. Il est d’ailleurs certain qu’on trouve dans le Vinaya tibétain un grand nombre d’Avadânas, et tout porte à croire qu’il en existe beaucoup dans le Vinaya népâlais que nous ne connaissons pas. Certains Avadânas, certaines conclusions d’Avadânas peuvent avoir un caractère nettement « disciplinaire ». En un mot, il se peut que l’avis émis par Burnouf se justifie dans un grand nombre de cas particuliers. Comment l’aurait-il formulé sans cela ? Et, toutefois, il a senti le besoin de faire des réserves ; il a signalé, et signalé avec insistance, des analogies entre les Avadânas et les Sûtras. Mais il y a là comme une contradiction ; car il faut bien qu’un texte