Page:Béland - Mille et un jours en prison à Berlin, 1919.djvu/247

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
245
EN PRISON À BERLIN

les tranchées, et encourage de la sérénité de son sourire ceux à qui il demande de ne point douter de la patrie.

. . . . . . . . . . . . . . . .

De nombreuses paroisses furent privées de leur pasteur. J’entends encore l’accent douloureux d’un vieillard à qui je demandais s’il avait eu la messe, le dimanche, dans son église ébréchée ; voilà deux mois, me répondit-il, que nous n’avons plus vu de prêtre. Le curé et le vicaire étaient dans un camp de concentration à Munsterlagen, non loin de Hanovre.

Des milliers de citoyens belges ont été ainsi déportés dans les prisons d’Allemagne, à Munsterlagen, à Celle, à Magdebourg. Munsterlagen seul a compté 3,100 prisonniers civils. L’histoire dira les tortures physiques et morales de leur long calvaire.

Des centaines d’innocents furent fusillés ; je ne possède pas au complet ce sinistre nécrologe, mais je sais qu’il y en eut, notamment, 91 à Aerschot et que là, sous la menace de la mort, leurs concitoyens furent contraints de creuser les fosses de sépulture. Dans l’agglomération de Louvain et des commîmes limitrophes, 176 personnes, hommes et femmes, vieillards et nourrissons encore à la mamelle, riches et pauvres, valides et malades furent fusillées ou brûlées.

Dans mon diocèse seul, je sais que treize prêtres ou religieux furent mis à mort. L’un d’eux, le curé de Gelrode, est, selon toute vraisemblance, tombé en martyr. J’ai fait un pèlerinage à sa tombe et, entouré des ouailles qu’il paissait hier encore avec le zèle d’un apôtre, je lui ai demandé de garder du haut du ciel sa paroisse, le diocèse, la patrie.