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Page:BLANQUI - Critique sociale, I.djvu/103

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le luxe


feu de paille, La première furie passée, les vieilles antipathies renaissent, et tout le bloc reste pour compte aux infortunés imitateurs. Un bouillon affreux.

Ainsi des choses du luxe. Aujourd’hui, hors de prix ; demain, hors de marché. Les frasques et les joyeusetés d’en haut ont, en bas, pour contre-coup, parfois une fortune des Mille et une Nuits, le plus souvent, les déceptions et la ruine. Cela ne déconcerte nullement les panégyristes, L’encensoir fume sans interruption.

Lorsque le préfet de la Seine, Henri Chevreau. a pendu la crémaillère à l’Hôtel de Ville en février 1870, les journaux ont dressé en triomphe le bilan de la cérémonie, chiffrant par millions les gains du commerce parisien : tant pour les comestibles du festin gargantuesque, tant pour les luminaires, les tentures, les fleurs, tant pour les toilettes féeriques, tant pour la main-d’œuvre de ces merveilles : et ils foudroyaient l’anarchie, coupable à la fois d’impuissance à répandre de si grands bienfaits, et d’acharnement à les détruire.

Ces bienfaits ont coûté aux mansardes et aux chaumières dix mille existences peut-être. Ces millions, engloutis par les saturnales de l’opulence, avaient été pris aux travailleurs sur les premiers besoins de la vie. Ils ont mis au tombeau, par le jeûne, par le froid, des milliers de petits enfants. Ils en ont condamné des milliers