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Page:BLANQUI - Critique sociale, I.djvu/173

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apologue du menuisier, par bastiat

Rendre un service pour de l’argent ! Mais c’est l’ambition universelle. Qui donc ne soupire après ce bonheur ? Combien meurent à la peine pour n’avoir pu obtenir cette chance qui rend si hautain et si dur le fabricant de planches de Bastiat ! Rendre service à la société, c’est-à-dire lui céder sa marchandise contre de l’or, est-ce donc une besogne si facile ? Les commis-voyageurs, les courtages, les hauts prix des clientèles, la quatrième page des journaux, tant de soucis, d’efforts, de sacrifices, pour se défaire de sa denrée moyennant finance, n’attestent-ils pas la difficulté de la première partie de l’échange, la vente, par conséquent l’obligation d’accomplir la deuxième, l’achat ?

Malheureusement la morale n’a pas de crédit ouvert dans les affaires. On sue sang et eau pour vendre. Quand on tient le précieux métal, on ne s’empresse plus de le lâcher. L’épargne est une vertu si recommandable et si recommandée ! On se prive et on prête. Les écus, au lieu de s’envoler avec la dépense, rentrent au bercail avec des petits à la fin de l’année. Tant pis pour le producteur que la mévente contraint d’emprunter. Il travaille désormais pour la sangsue attachée à ses flancs. Les dollars de l’accaparement lèvent leur dîme impitoyable.

Cet argent, ainsi soustrait à la circulation dans un but d’usure, l’économie le déclare un droit