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l'usure

maître de mon bien. Est-ce que vous prétendez disposer de ma bourse, vous ?

Lazare. — Non ! Je tiens seulement à constater que vous la remplissez aux dépens d’autrui.

Gobseck. — C’est-à-dire que je suis un voleur.

Lazare. — Je ne vous démentirai pas.

Gobseck. — Je suis un voleur, parce que je ne veux pas acheter vos meubles, ni vous prêter de l’argent gratis.

Lazare. — Et que vous agissez de même avec tout le monde.

Gobseck. — Pourquoi ne me dénoncez-vous pas à la justice ?

Lazare. — Parce qu’elle me donnerait tort.

Gobseck. — Oh ! bien alors, me voilà tranquille. Je pourrai faire des économies sans aller en prison.

Lazare. — Vous passerez même pour un homme rangé, honorable, un modèle de vertu, et vous finirez par entrer dans les dignités.

Gobseck. — À vrai dire, j’y comptais un peu, et je suis ravi de votre prédiction qui confirme mes espérances.

Lazare. — Cela n’empêchera pas qu’on ne vous déteste.

Gobseck. — Oh ! La haine des mauvais sujets fait beaucoup d’honneur.

Lazare. — Les mauvais sujets que vous aurez mis sur la paille.