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VERLAINE



A mon âge, je sais, il faut rester tranquille.
A moins que de plonger…
Dans la crapule des célibats innommables.
Je sais bien et pourtant je trouve plus aimables
Les femmes et leurs yeux et tout d’elles[1].


Il avoue même que, parfois, il se fait horreur [2], mais ces désespoirs ne sont que passagers ; la femme le reprend tout entier [3] et sa débauche s’accentue d’autant plus qu’il sent la vie lui échapper :

Aimons bien fort
Jusqu’à la mort
Aimons drument et verdement[4].


D’ailleurs :

La chair est sainte ! Il faut qu’on la vénère…
Malheur à ceux qui ne l’adorent pas ![5]


Alors ses conseils se précisent ; son cynisme s’affirme avec ostentation :

Soyons scandaleux sans plus nous gêner,
Livrons-nous à notre nature
Dans l’oubli charmant de toutes pudeurs ;
Jouir et dormir ce sera notre seule et double vertu[6].


Cependant, quelles que soient les séductions de l’amour, la sensualité satisfaite entraîne le poète à des méditations dont le pessimisme est le terme :

Il pleure dans mon cœur comme il pleut sur la ville[7].


C’est la mélancolie inexplicable qui s’abat sur l’âme quand

  1. Elégies, I.
  2. Chansons pour elle, XXIII.
  3. Chansons pour elle, XXV.
  4. Chansons pour elle, XVII.
  5. Jadis et Naguère, Don Juan pipe.
  6. Chansons pour elle, XVIII.
  7. Romances sans paroles, II et III.