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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

nablement. Ne nous laissons pas égarer par les feux follets de l’imagination.

La Russie avant tout ! que Dieu m’aide seulement.

J’ai écrit à maman. Me voilà hors de l’amour, et jusqu’aux oreilles dans les affaires. Oh ! que Dieu m’aide seulement, et tout ira bien.

Que la Vierge Marie prie pour moi !


Jeudi 27 juillet. — Enfin, hier à sept heures du matin nous avons quitté Paris.

Pendant le voyage, je me suis amusée à donner une leçon d’histoire à Chocolat, et ce brigand, grâce à moi, a une idée des anciens Grecs, de Rome gouvernée par des rois, puis en République et enfin en Empire, comme la France ; et de l’histoire de France à partir du roi auquel on a coupé le cou.

Je lui ai expliqué les différents partis qui existent à présent ; et Chocolat est au courant de tout ; il sait même ce que c’est qu’un député, Je racontais et je le questionnais ensuite.

Et quand j’eus fini, je lui demandai à quel parti il appartenait. Ce brigand me répondit :

— Je suis bonapartiste !

Voici comment il résume ce que je lui ai appris : — Le dernier roi était Louis XVI, qui était très bon, mais les républicains, qui sont des gens qui ne cherchent qu’à avoir de l’argent et des honneurs, lui ont coupé le cou, et à sa femme Marie-Antoinette aussi, et ils ont fait une république. Alors la France était très misérable, et il est né en Corse un homme qui était Napoléon Bonaparte et qui avait tant d’esprit et de courage qu’on l’a fait colonel, puis général. Alors il a conquis tout le monde, et les Français l’aimaient beaucoup. Mais, étant allé en Russie, il a oublié de prendre des pelisses