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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/22

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LA FEMME DU DOCTEUR.

rive de s’absenter assez longtemps ; mais j’ignore quelle partie de la province il visite. Il n’est pas convenable de faire ces questions-là, tu sais, George ; aussi je m’abstiens. Je ne le crois pas riche, je veux dire que sa fortune n’est pas encore faite. Parfois il y a abondance d’argent, et alors il faut voir les dîners du dimanche… du saumon et des concombres, de la dinde et des pois verts comme s’ils ne coûtaient rien.

— Est-ce un bon garçon ?

— Oui, c’est un homme rond et franc, il a le verbe haut et les yeux noirs. Il est charmant avec moi. Mais il ne raffole pas des visiteurs. Il se montre rarement lorsque j’amène un ami. Il est possible que tu ne le voies pas du tout pendant ton séjour. Il s’enfermera dans sa chambre et ne te regardera seulement pas.

George se montra assez inquiet de cette perspective.

— Mais si ma présence chez lui déplaît à M. Sleaford, — commença-t-il, — peut-être vaudrait-il mieux…

— Elle ne lui déplaira pas, sois tranquille, — s’écria vivement Sigismund, — rien de pareil. L’autre jour, à déjeuner, j’ai dit à Mme Sleaford : « Je vais avoir la visite d’un de mes amis qui habite le Midland ; c’est le plus honnête garçon du monde, et de plus c’est un joli garçon, » — ne rougis pas, George, tu aurais l’air d’un nigaud, — je demandai donc à Mme Sleaford si elle pouvait te donner une chambre et une demi-pension, — comme à moi, tu sais, — pendant une semaine environ. Elle regarda son mari, — elle est très-raide avec nous, mais elle a peur de nous, — et Sleaford répondit oui ; que mon ami pouvait venir et qu’il serait le bien venu tant qu’il ne serait pas gênant. Aussi ta chambre est-elle prête, George, et tu viens pour me voir : j’aurai des billets pour tous les théâtres de