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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/231

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LA FEMME DU DOCTEUR

tude de regarder avec insistance les jolies femmes. Pourquoi un homme se laisserait-il aller à toutes sortes d’extases convenues devant un Raphaël ou un Guide et se défendrait-il d’un mouvement d’admiration platonique quand il regarde une toile sortant des mains de la Nature, cet artiste par excellence, qui, du reste, commet aussi fréquemment des fautes de couleur et de dessin que les autres artistes ? Oui, j’admire Mme Gilbert et je la regarde avec plaisir. Je ne la crois pas meilleure qu’une autre, mais elle est assurément beaucoup plus jolie. C’est une magnifique figure de cire renfermant à l’intérieur un ingénieux mécanisme, suffisant pour lui permettre de dire : « Oui, s’il vous plaît, » et : « Non, je vous remercie. » Une charmante négation possédant des yeux bruns à reflets dorés. Avez-vous remarqué ses yeux ?

— Non, — répondit sèchement Gwendoline, — je n’ai rien remarqué, sinon qu’elle a très-mauvaise façon. Quelle singulière idée a eue là M. Raymond de se coiffer de cette personne ? Il me semble qu’il prend à tâche de produire toutes sortes de gens extraordinaires.

— Mais Mme Gilbert n’a rien d’extraordinaire ; elle est très-bornée et très-vulgaire. Elle était bonne d’enfants, gouvernante, ou quelque chose comme cela auprès des malheureuses petites nièces de cet excellent Raymond.

Il ne fut pas davantage question de M. et Mme Gilbert. Gwendoline ne se souciait pas de parler de ces petites gens qui venaient se jeter dans son triste chemin et lui dérober les quelques rayons du flambeau qui était maintenant le seul éclat de sa vie. — le flambeau de la présence de son cousin.