Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/207

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nauté, syndic ou adjoints : ces derniers, au cours de leurs visites[1], étaient fréquemment l’objet des invectives des ouvriers. Un manuscrit de la Bibliothèque Nationale nous apprend que « les compagnons de trois imprimeries de Paris furent, par un arrêt du 2 septembre 1786, condamnés, les protes exceptés, à faire des excuses solennelles à ces officiers[2] ».

Le correcteur est aujourd’hui affranchi de la tyrannie — le mot est un peu gros, on nous en excusera — que la « chapelle » faisait peser indistinctement sur tous les travailleurs de l’atelier ; il importe qu’il se tienne à l’écart de ces « petites chapelles » que certains protes, par une méconnaissance complète de leurs droits et de leurs devoirs, tolèrent encore trop souvent dans les ateliers modernes. Le correcteur doit être « tout à tous » ; il ne saurait s’aliéner lui-même et devenir

  1. Dans son article 16, un édit donné à Châteaubriant, le 27 juin 1561, prescrivait : « Voulons, ordonnons et nous plaist que, deux fois en l’an, pour le moins, esdites villes où il n’y a université et faculté de théologie, soient visitées les officines et boutiques des imprimeurs, libraires et vendeurs de livres… Ausquelz députez lesdits imprimeurs et libraires seront tenus et contraints par toutes voyes en tel cas requises, faire ouvertures de leursdites boutiques et officines, pour saisir et mettre en nostre main tous les livres qu’ils trouveront censurez et suspects de vice, et ce sans aucun salaire. »

    L’article 17 édicte les mêmes prescriptions pour la visite des imprimeries de la ville de Lyon et se termine ainsi : « Et si en procédant èsdites visitations ils trouvent faute notable, ils nous en advertiront, pour faire procéder contre ceux qui les feront, et y donner telles provisions que nous verrons estre à faire. »

    Les députés furent d’abord « deux bons personnages commis par les facultez de théologie », ou « l’official et le juge présidial », ou encore « le juge et le procureur au siège » ; à Lyon, ce furent « deux bons personnages, gens d’église, l’un député par l’archevesque de Lyon, ou ses vicaires, l’autre par le chapitre de l’église dudit lieu, et avec eux le lieutenant du sénéchal dudit Lyon ». — Plus tard, lorsque fut constituée la Communauté des Libraires, Imprimeurs et Relieurs (juin 1618), ce furent les officiers de la Communauté (syndic et adjoints) qui assumèrent la charge et les responsabilités de ces visites (art. 18 et 23).

    L’article 57 de l’édit donné à Versailles en août 1686 s’exprimait ainsi à ce sujet : « Les syndic et adjoints feront des visites générales dans les imprimeries, du moins une fois tous les trois mois, dans les boutiques des libraires et dans les imprimeries, toutes et quantes fois qu’ils le trouveront nécessaire. Ils dresseront procès-verbal des ouvrages qui s’imprimeront, des apprentis qu’ils auront trouvés, du nombre des presses de chacun maître imprimeur, et des malversations (si aucunes il y a) ; lequel procès-verbal ils mettront entre les mains du lieutenant général de police pour y pourvoir. »

    L’article 54 du même édit prescrivait : « Enjoint aux imprimeurs, libraires, relieurs, doreurs, colporteurs et autres, de porter honneur aux syndic et adjoints, et de leur obéir en fesant leurs charges ; défenses de les injurier, méfaire ou médire, à peine d’amende et de punition exemplaire, si le cas le requiert. »

  2. Bibl. Nat., mss fr. 22061 et 11067 (d’après J. Radiguer). — Il faut lire, pour être édifié à ce sujet, le volume de M. J. Radiguer, Maîtres imprimeurs et Ouvriers typographes, Paris, 1903.