Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/260

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se montre-t-il jamais satisfait de son savoir : s’il s’intéresse vivement aux choses de l’imprimerie, il n’oublie pas que toutes les branches de la science doivent lui servir de sujets d’étude.

Il est nombre de professionnels qui peuvent « borner leur savoir » aux connaissances nécessaires à l’exercice de leur profession : un mécanicien, un forgeron, un charpentier, un mathématicien, un ingénieur ont la liberté de se spécialiser ; alors ils acquièrent une maîtrise remarquable de la technique et de la pratique de leur art ou de leur science.

Le correcteur peut-il « borner son savoir » à son métier ? « Quelles limites peut-on imposer à cet art universel qu’est la typographie ? » Nul ne saurait le dire : la Typographie puise dans toutes les branches de l’industrie ; elle s’alimente à toutes les sources de la richesse publique ou privée ; elle étend sur le monde ses rameaux bienfaisants et nourrit l’intelligence humaine toujours assoiffée de désirs.

« Borner son savoir à son métier », c’est n’être qu’à demi correcteur ; c’est tomber dans la méprise regrettable de ceux qui prétendent que, pour être bon correcteur, il est nécessaire d’être surtout, et presque exclusivement, typographe.

Sans doute, le correcteur ne saurait, tel un Pic de la Mirandole, affirmer qu’il est capable de « disserter de omni re scibili et de quibusdam aliis » ; mais il ne peut, sans risques de perdre de sa valeur, sans se diminuer lui-même, rester étranger à « quelque chose ». « De tout un peu, de tout suffisamment », c’est la devise qu’il doit faire sienne ; c’est la formule qui, seule, répond aux nécessités que lui imposent et ses fonctions et sa situation ; il fera preuve de sagesse et d’intelligence en s’y accommodant.

II. Le correcteur doit se persuader que, pour remplir complètement son rôle, pour répondre dignement à la confiance qu’on lui témoigne, il doit pouvoir se pénétrer du sujet qui constitue sa lecture, s’identifier à l’auteur lui-même, et comprendre distinctement ce que celui-ci veut dire ; alors il lui sera facile de discerner les erreurs flagrantes qui, par inattention, ont échappé à l’écrivain.

Le rôle du correcteur est ainsi tout autre que celui auquel certains patrons, et après eux nombre de protes, prétendent limiter les ser-