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APPENDICE. — No I.

sont les objets d’un culte pour les Buddhistes, et sont des preuves de l’intime connexion et de la ressemblance qui existait entre les idées théologiques des Bâuddhas et celles des Vâichṇavas. Cette connexion expliquera probablement comment il se fait que, selon les Purâṇas et le système de l’Hinduisme orthodoxe, Buddha, c’est-à-dire l’Être suprême, suivant les idées théistes ou athées de ses sectateurs, passe pour être la neuvième incarnation de Vichṇu, lequel, dans le Vichṇu purâṇa, est nommé Vasudêva et considéré par les sages sous quatre différents rapports, savoir : Pradhâna, la matière primitive ou nue ; Purucha, l’esprit ; Vyakta, la substance visible, et Kâla, le temps[1]. »

J’ai dû répéter ici l’explication du docteur Bird pour montrer jusqu’où peut entraîner le goût des interprétations mythologiques appliquées sans distinction à toute espèce de monuments, à ceux qui sont manifestement religieux, comme à ceux dont la destination est la plus simple. Quand on aura pu vérifier combien est différent l’objet de cette courte inscription, on ne sera que plus vivement porté à regretter que les Anglais, qui s’occupent dans l’Inde de recueillir et de déchiffrer ce genre de monuments, s’éloignent quelquefois de la méthode de J. Prinsep, qui sans être à proprement parler un philologue, ne s’épargnait cependant aucun effort pour faire concorder ses interprétations non pas seulement avec le sens commun, mais aussi avec les lois de la langue qu’il supposait être celle de ses inscriptions.

Voici d’abord comment je lis le texte ; je dirai ensuite les points qui restent, encore obscurs ou douteux pour le sens. Après le premier signe, qui représente un diagramme dont je ne connais ni le nom, ni la valeur, je lis : gaṇâtchariyânam̃ thérânâbha | yam̃tasulisânam̃ têvidjâ | nam̃ am̃têvâsinam̃ thêrâṇam̃ bha | yam̃ta tchêtiyâsanam têvi | djânam̃ nam̃dina… kam | … sum̃kathalikî | … gâhapati | … taṇânam dim̃ṇanâ… Les deux premiers mots de la première ligne signifient certainement, « pour les Thêras précepteurs d’une troupe. » Le premier de ces termes dans le système inversif de l’inscription gaṇâtchariyânam̃, sauf la légère différence introduite par le dialecte pâli ; et il est certainement de quelque intérêt de retrouver sur une inscription un titre qu’on ne donnait sans doute qu’aux Religieux qui étaient suivis par un nombre plus qu’ordinaire de disciples, à nous en rapporter du moins au témoignage du texte du Lotus, où ce titre s’applique à des Bôdhisâttvas accompagnés d’un immense nombre d’auditeurs. Ces maîtres, que suit une foule nombreuse, sont nommés thêrâna pour thêrânam̃, l’omission de Vanusvâra étant très-fréquente dans les inscriptions pâlies ; cela veut dire qu’ils sont vénérés pour leur âge, qu’ils sont des anciens, c’est-à-dire de ceux, que l’on nomme en sanscrit sthaviras, et en pâli thêras. Cette qualité de thêras revient encore une fois dans notre inscription, à la fin de la troisième ligne, où elle est écrite thêrânam̃, mais où elle suit un mot que je lis am̃têvâsinam̃, « des disciples. » Cette classe de personnes est certainement opposée à la première, celle des maîtres ou précepteurs d’une troupe ; et l’inscription, du moins dans ce qu’elle offre de lisible et d’intelligible pour moi, se divise ainsi en deux parties : « Pour les Thêras, précepteurs d’une troupe… pour les

  1. J. Bird, Historical Researches on the orig. and principles of the Bauddha and Jaina Relig. Bombay, 1847, p. 52, et pl. L, no VIII.