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la traversée du lac

Silence ! Trois tintements ! une fois… deux fois… trois fois… sonnerie plus longue : l’Angelus.

Ils l’ont récité pieusement, tête découverte. Oh ! l’émotion douce ! Depuis des mois entiers plus un son de cloche.

Elle vibre, peu forte, petite cloche de mission, mais si consolante, si mélodieuse par dessus l’eau paisible du lac.

Ils se dépêchent. Le canot glisse, nerveux.

Comme on sortait d’une baie sous des trembles géants, l’horizon parut de feu. Le soleil se couchait dans son apothéose de pourpre, de rouge, de violet, incendiant l’immensité.

Puis, très nette, une chaumière se montre ; une autre, là-bas ; en voici trois ou quatre groupées. Le vent tiède charrie dans l’espace des arômes de terres labourées… Un clocheton se dessine sur l’opale du soir…

— Saint-Méthode, prononce le vieux Jérémie Sainclair.

Petit François, tout à l’avant du canot, s’est mis à genoux, bien doucement. Il regarde avidement le paysage nouveau dans son décor vespéral.

Une paroisse jeune lui souhaite, de loin, la bienvenue. Les terres neuves l’appellent.

Sa main candide salue, naïve et joyeuse, comme on « bonjoure » une personne aimée qui nous attend sur le rivage.