Aller au contenu

Page:Desforêts - Le p’tit gars du colon, 1934.djvu/96

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
le p’tit gars du colon

Puis tout disparut dans la forêt qui s’ouvrait, et la route morne qui reprenait.

Et l’on s’en fut par les déserts, les bois et les savanes, sans chemin frayé, toujours plus au nord, jusqu’à ce Lac Saint-Jean qu’on disait grand comme une mer, et sans une maison sur ses bords extrêmes, sans un labour dans les forêts qui l’environnent, sans âme qui vive, sinon les quelques bûcherons peinant, là*bas, tout l’hiver, ignorés, perdus, six mois durant, dans les vastes solitudes.

Après plusieurs heures d’un voyage presque sans paroles, on arriva près du lac. On fit halte sous des épinettes vigoureuses dont les fortes ramures mettaient à l’abri du vent glacial. L’atmosphère restait froide douloureusement, quoique le soleil brillât très lumineux, par dessus les hautes cimes vertes.

François Gaudreau fit allumer du feu dans un espace qu’on déblaya sommairement ; et ce travail ravigota le sang ; une flamme soudaine monta sous le couvert des longs panaches baignés des lumières blanches du firmament et du reflet du brasier ; le repas tout frugal, — n’était-ce pas celui de tous les midis ? — parut excellent. Des flammes actives rayonnaient une douceur pénétrante, inespérée… La halte dans la forêt, près du lac, leur fut bonne à tous les cinq.

Il advint que la chaleur soigneusement entrete-