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TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

Puis la silhouette longue et fine se détaille. Trois tourelles régulièrement espacées pointent au-dessus de la masse. En revanche, disparaît l’illusion d’une enceinte de murailles que produisait la netteté avec laquelle les pieds de la ville se détachaient sur le sable blanc. On distingue maintenant des terrasses de maisons cubiques s’étageant doucement, de manière à donner idée de la profondeur de cette masse au long profil, renchérissant ainsi sur la première et grande impression.

Et, au lieu de venir des bords du Niger, que vous arriviez des rives de l’Atlantique par la route d’Araouan et du Maroc, ou des côtes de la Méditerranée par la route de Ghadamès ou de Tripoli, toujours la ville se présente en silhouette fine, longue et profonde, et évoque le grand dans l’immense toujours.

Nous sommes parvenus à l’entrée de la ville. Et voilà que disparaît l’impressionnante vision, tout à coup, comme un décor dans les dessous d’un théâtre.

Un nouveau tableau a surgi, d’impression grande, lui aussi, mais par son caractère tragique.

Au lieu de pénétrer dans la cité régulière et compacte promise par cette vision longue et profonde que l’œil garde encore, il semble que l’on entre dans une ville qui vient de passer par tous les drames accumulés d’un siège, d’une prise et d’une destruction.

Ce premier plan, qui, de loin, sous le jeu des ombres et du soleil, paraissait former une ceinture de remparts, sait-on ce que c’est ? Des maisons désertes, éventrées, dont les plafonds se sont effondrés, dont les portes sont absentes ; des pans de murs ébréchés et croulants ; puis des tertres de ruines informes, amoncellements de terre, de briques crues et de morceaux de bois. Et, au milieu de tout cela, des espaces libres, sans doute les chaussées des maisons défuntes.