Page:Fiel - Sur le sol d'Alsace, 1911.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
6
SUR LE SOL D'ALSACE

nisme croissait à mesure que la revanche espérée reculait. Depuis la disparition de ses maîtres, son ardeur patriotique s’amplifiait. Ne craignant plus la sourdine que mettait Mme Denner à son exaltation, elle entretenait Louise des heureuses années où l’Alsace ne se soumettait pas aux nouvelles lois. Elle parlait sans cesse de la France qu’elle ne connaissait pas, et ne tarissait pas sur la beauté qu’elle imaginait à cette proche patrie, qui lui apparaissait nimbée de l’auréole que donnent les distances. Louise l’écoutait, distraite. Le temps, comme une vague, avait entraîné le chaud enthousiasme, et les nouvelles générations n’en entendaient plus que les échos assourdis. L’autocratie allemande empêchait les germes français de fleurir. Louise ne sentait donc pas, comme ses aînés, toute l’amertume de la défaite et l’horreur de se rendre. Elle ajoutait l’année 1870 comme un fait de l’histoire, suivant d’autres faits ; elle se souvenait d’avoir appris que les nations sont tour à tour victorieuses et vaincues, et, en philosophe, nullement atteinte, elle acceptait l’événement accompli. La destinée de Saverne, particulièrement