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SUR LE SOL D’ALSACE

Elle écrivait aussi de longues lettres à Fritz, le conjurant d’être prudent, et lui parlait de sa tendresse, le suppliant de ne pas s’attirer de représailles. Elle en recevait des réponses vibrantes d’exaspération, touchant la vie qu’il menait : tout lui déplaisait, ses camarades et leurs manières. Il les fréquentait d’ailleurs de moins en moins et prenait patience en attendant le jour enivrant où il irait en France.

Louise, troublée, ne pouvait lire ces lettres d’un seul trait. Un malaise l’envahissait… et elle croyait commettre une trahison en éprouvant un semblant de joie… Elle se raisonnait en se disant que ses ancêtres avaient cependant le droit de revivre dans un de leurs descendants.

Pour détourner son esprit de ces soucis, elle composait des gerbes de fleurs rares qu’elle prenait dans les serres et les portait au caveau de la famille. Le jardinier ne cachait pas son mécontentement et déplorait que ces plantes, écloses au prix de longs soins, aillent se faner dans l’obscurité d’un tombeau, ou geler au contact des morts. Mais Louise passait outre. Elle obéissait